Elle était devenue putain par résignation

Et très sage philosophe en cette triste dérive

Pour les bien honnêtes gens une abomination

Mais la vérole l’expédia sur d’autres rives

 

Là, Charon lui lance, infernal croque-mort :

"Avant d’embarquer, il te faut remplir ma bourse ;

Pour traverser ce marais, rejoindre les morts

Donne-moi déjà mon obole pour la course !"

 

"Hé, je n’ai plus la moindre pièce : les loueurs d’entrailles,

Les guérisseurs, les charlatans m’ont dépouillée de tout…"

"Alors tant pis pour toi, tel est ton destin : que tu ailles

Te lamenter sur ces côtes brumeuses, voilà tout !"

 

"Non, reste ! écoute et tu seras satisfait ;

Vrai, je ne suis qu’une pute et ma main est vide

Mais le sale bidochard qui me tarifait

Jamais ne m’arracha une pierre limpide

 

Un diamant si étincelant d’une eau sept fois pure

Dont les facettes luisent d’une clarté… souveraine

Car elles ont cristallisé dedans la pire ordure

Ces quelques riens de pureté qui nous rassérènent

 

Larme minérale aux pouvoirs ensorceleurs

Sa dureté affranchit de tous les tourments…

Cet indomptable ignoré des bas receleurs

C’est mon âme, plus mûre que tous diamants

 

Ah, je vivais dans la perversion, moi la maudite ;

Tous me bafouaient, tous m’humiliaient mais sous l’écorce,

Là, se forgeait une maturité pour eux proscrite

Et qui rayonne à tout jamais d’une invincible force

 

Seul l’exclu d’entre deux Mondes, le Transgresseur

Peut la saisir et peut la garder, rutilante…"

 

Depuis les Ombres s’écartent du Passeur :

Ainsi révélée , sa barque les épouvantes.

 

 

dominique.gelay@wanadoo.fr

 

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