Nogent, Romilly, vous voyez je suis de retour

 

J’ai repris mon bâton de pèlerin

 

Gagné par le silence de mon hibernation

 

Je suis ce papillon solitaire

 

Qui chevauche au gré des saisons

 

Cet étalon délaissé dans les vapeurs du rêve

 

Quelque part dans l’ombre de la Seine

 

Dans les méandres de ses ondes ombragées

 

J’étais seul, vidé de mes pulsions

 

Rivé au quai, semblable à tes péniches

 

Lourdement chargées de la cargaison des souvenirs

 

Tes eaux lourdes surveillaient mes débats

 

Les délires d’un nostalgique ermite

 

Narrant à qui veut l’écouter

 

La longue litanie des couleurs et des lumières

 

Je respire à pleins poumons

 

La mouvance du vent sur la face de l’eau

 

La sveltesse de tes arbres dont les cimes s’épousent

 

Le chant de tes oiseaux migrateurs

 

Les parfums exotiques qui s’embrassent …

 

Je refais le trajet d’antan

 

Me recueille aux mêmes endroits chéris

 

Enlace le même espace fleuri

 

Et puis quand l’ivresse me bouscule

 

Je retourne d’un pas lourd à mon gîte

 

Redécouvre mes anciennes visions encre fraîches

 

Mes papiers blancs, mes crayons, l’espoir …

 

Lentement je refais des ébauches

 

Verse à pleines mains la rosée colorée

 

J’irrigue des mes heures renouvelées

 

L’ombre des cyprès, des lilas, des roses …

 

Touche après touche, l’errance se fait voyage

 

Les lieux se font des escales ensoleillées

 

Et la ville ainsi changée reprend vie …

 

L’été dont le vent change et perd son pouvoir

 

L’été dont le soleil perd son ardeur et sa force

 

Voilà que de partout s’élèvent les voix de la trêve

 

Voilà que s’annonce la fin d’une saison

 

Et qu’au fond de moi - même surgit

 

L’appel du nouveau voyage

 

L’ultime rappel d’un retour imminent

 

Plus rien … oui plus rien, un simple accueil

 

Je décide de mon évasion de signer cette escapade

 

Sur les ailes d’un vent éphémère

 

Sur le dos d’une feuille tombée dans la Seine

 

Sur l’onde bleutée d’une goutte d’eau à la dérive

 

Demain , l’heure tant oubliée, redoutée

 

Approche à pas feutrés et sans détour

 

Distille dans mon cœur lassé son rappel

 

Chaque minute qui passe me rapproche davantage

 

De la fin de mon périple argenté ...

 

Mes mains s’agrippent aux vestiges lumineux

 

Mes yeux à chaque espace fréquenté et aimé

 

Et ma mémoire dont la flamme continue de vibrer

 

Gardera quelque part dans un coin isolé

 

Dans une zone inconnue et tenue en veilleuse

 

Le passage d’une étoile filante dans le ciel

 

De Nogent, Romilly, troyes …

 

Le passage d’une ombre … dans les murs de tes villes

 

 

Romilly sur Seine (France)

Mercredi 6 Septembre 1995

Publié par L’Est - Eclair 14/09/1995

 

 

Kacem Loubay

 

 

 

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