La plume perdue



Elle m'avait encore échappée... je ne serai dire comment,
Mais c'est de nouveau arrivé... Je la tenais pourtant
Fermement, puis, sans le voir, de ma main elle avait glissé,
Et depuis ne donnait plus de nouvelles... Je n'avais,
Ô comble de l'encre ! pu voir par où elle filait,
Comme si son essence s'était évaporée. Lorsque
J'interrogea les cieux, ceux-ci me répondirent,
« Le vent, ce coquin a dû la soulever, et vous la ravir »
« Oui... mais où ? vous qui savez l'invisible, le romanesque,
Le pittoresque, et l'état brute, ce qui est dans le silence,
Ne pouvez vous point m'apporter votre science ? »
«Ne nous surestimait pas, nous sommes, et vous êtes, allez
Donc interroger le vent, il se trouve avec les nuages ».

Sur ces derniers mots, quelque peut tombé des nues,
J'allais avec ma main orpheline, mon coeur soufflé,
A la rencontre du mouvement, du souffle de l'air. Le rivage
D'Eole je gagnais par l'écoute, murmures dans les rues
Lui soufflais, et inquiet, lui demandais « Avez vous porté
Ma plume quelque part ? Savez vous où je pourrais
La retrouver ? »... Je ne sais, peut être ne pouvais je comprendre
Son langage, mais je n'eus de réponses, ses claquements, ses brises
Continuaient comme si de rien n'était, me laissant avec mes méandres.

Décontenancé, je retournais devant la page blanche. Elle était emprise
De compassion pour mon cas, et ne demandais qu'à faire
Un peu d'ombre sur son rivage à l'écume de mes mots.
Elle me conseilla dans son éclat, de me tourner vers les étoiles,
Me suggérant d'en parler avec la fée... la conversation lunaire
Fut vite écourtée, trop de nuages flouaient l'océan d'en haut,
Et pour échappatoire, je me résolu à baisser le voile
Du lieu abyssale. Après tout, curieuse, la plume, peut être,
S'en était allée faire un tour dans les paysages tempétueux,
Voir en enfer, pour savoir les lieux dont je n'étais maître,
Et dont je lui refusais obstinément l'envolée. Peut être, odieux
Fils du temps, y était elle allée mourir ? pour ne plus jamais revenir ?
Mon ventre se nouait à la pensée d'un silence définitif, rédhibitoire.
Il fallait que ma main en soit sur. Je décidais ainsi d'ouvrir,
Pour commencer les vannes du fleuve, puisant, remuant, enflammé par l'espoir
De la retrouver, dans chaque bout d'espace, chaque association de mots
Retrouvés au rivage découvert. Il y avait tant de trouvailles, faisant naître des maux,
Qui faisaient rejaillir des mots, qui eux mêmes faisaient... que sur les rivages
Asséchés, je commençais à me sentir noyé, submergé. Bien décidé
A ne pas rentrer bredouilles, je décidais de plonger, en entier,
Visitant le reflet du soleil, l'ombre de la fleur, puis les chimères, les mirages...
Une ombre me déchirait, passait le portail où gisaient des pensées
Mortes nées, un doigt sidérale fleurait les murs, prêt à tout percer.
Je n'avais cependant pas peur de m'y noyer, décidé à affronter,
Braver le.... à ne pas abandonner ma plume. Puis tout s'est accéléré,
Je me suis sentie vaciller, tanguer, suffoquer, sans aucune inspiration.
Le vide, le néant ? Le noir ? Je n'ai su le définir, l'absence de création ?
L'immobilité ? Cela peut-il exister ? Toujours est-il qu'ensuite, je me suis retrouvé,
Les pupilles ouvertes, à genoux, posé sur nuage rêveur, la plume à mes côtés.
Avais-je halluciné ? A ma question, la plume répondit en accord avec son amie
La page, griffonnant ce qu'elle avait découvert, son souffle de vie ?... à ma stupeur, je vis...



© Pascal Lamachère
p.h.l.31@hotmail.fr

 

 

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